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Alger : étymologie et appartenance (première partie)

Dans une petite notice sur l'étymologie d'Alger, Albert Farhat écrit : « Le nom d'« Alger » dérive du catalan Alguère, lui-même tiré de Dzaïr du nom donné par Bologhine ibn Ziri, fondateur de la dynastie Zirides, lorsqu'il bâtit la ville en 960 sur les ruines de l'ancienne ville au nom romain Icosium; Dzaïr Beni Mezghenna. La signification du nom donné par Bologhine Ibn Ziri voudrait que le nom soit donné en référence aux îles qui faisaient face au port d’Alger, à l'époque, et qui furent plus tard rattachées à sa jetée actuelle ; en arabe Al-Djaza’ir « Les Îlots »; en français « Les Îles des Mezghenna » Djezaïr Beni Mezghenna). Le terme d'île pourrait, selon des géographes musulmans du Moyen Âge, également désigner la côte fertile de l’actuelle Algérie, coincée entre le vaste Sahara et la Méditerranée, apparaissant alors comme une île de vie, « Al-Jaza’ir».

Albert Farhat se réfère à Al Bakri : « Al Bakri, célèbre polygraphe (1) andalou, dans sa Description de l'Afrique septentrionale, cite dans son chapitre sur La route d'Achir à Dzayer Beni Mezghenna (vers l'an 1068, soit six siècles avant les Turcs, quatre siècles avant Ibn Khaldoun, un siècle avant les Almohades et une décennie avant les Almoravides, soit à peine deux siècles après l'islamisation de l'Afrique du Nord), la ville d'Alger comme encore imposante et sertie de voûtes et autres assises monumentales prouvant qu'elle fut « la capitale d'un vaste empire ». Louis Mas Latrie (2), reprend les propos d'El Bekri s'agissant de ses inductions quant à Icosium « capitale d'un vaste empire », Icosium n'étant qu'une Cité parmi d'autres au sein de l'Empire romain.

Concernant le nom même : Al Bakri dit que la ville s'appelle « Dzèyer Beni Mezghanna » et l'orthographie en arabe « Dzèyèr » et non « El-Djaza'ir ». De plus, très prolixe dans ses descriptions, il ne précise à aucun moment du chapitre que « Dzèyèr » signifie « les îles », bien au contraire assimilant le nom de la ville aux Beni Mezghenna. La version arabe, très claire à ce sujet fit régulièrement par la suite l'objet d'excès en interprétations. Ainsi, dans la traduction faite par William Mac Guckin de Slane (3), ce dernier rajouta l'explication « les îles de la tribu Mezghenna », mention qui n'existe nullement dans la version du texte arabe originel. De plus, William Mac Guckin de Slane orthographia « Djazaïr » au lieu de « Djzèyer », tel que transcrit phonétiquement par Al Bakri qui, lui, s'abstint dans son texte de toute interprétation superflue.

Nous saurons alors de manière formelle que le nom d'Alger ne comporte pas l'article défini « El » propre à la langue arabe, nous laissant croire que Dzèyer ne fait pas référence à un nom commun, ni à un qualificatif ou adjectif, alors précédés de l'article « El », mais qu'il s'agit plutôt d'un nom propre tout comme Mezghenna, Achir (qui ne se disent pas El-Mezghenna ou El-Achir, etc). Ainsi, le « El » de « El-Djazaïr », généralement admis, est un rajout ultérieur ayant induit à une fausse interprétation du nom d'Alger, faisant coïncider la ressemblance phonétique du mot avec la présence d'îlots. La tradition orale, plus conservatrice et au plus près de l'origine n'aura-t-elle pas conservé le vocable alors initial tel que transcrit alors par Al Bakri : Dzèyer/Dzèyer, qui sans l'article « El », est plus apte à désigner Ziri que des îlots (sachant en outre qu'en arabe l'île se dit El-Djazira et au pluriel El-Djouzour ). Et être un « Dziri » (c'est-à-dire Algérois), signifie en toute logique davantage être un « Ziride » (la ville devint sous Bologhine ibn Ziri la capitale de la dynastie Zirides, tribu des Ziri (Kabyles) qu'un îlien ou insulaire.

Al Bakri est considéré comme le tout premier polygraphe ayant couché par écrit, la géographie de l'Afrique du Nord médiévale (il associait encore le terme « El-Maghrib » avec celui de « Ifriqya », il ne citait pas « d'îles du Maghreb »). Par conséquent, si l'on doit retranscrire rigoureusement en langue arabe le nom d'Alger tel qu'écrit pour la première fois, il ne faudra plus l'orthographier « El-Djazaïr » : avec la cassure entre le « a » et le « i »), mais « Djzèyèr » avec le « y » et sans « El » selon l'orthographe d'Al Bakri alors au plus proche du parler de l'époque de la dynastie Ziride.
Le nom de Tigzirt : Tigzirt aurait pu être associée aussi au terme « île », sorte de berbérisation du mot arabe « el-djazira », qui deviendrait Tidjzirt puis Tigzirt, mais la ville située sur la côte de la Grande Kabylie, demeurée berbérophone, a gardé sa signification ancienne venue de ighzer (la source/ruisseau), devenue « Tighzert » (la petite source/petit ruisseau), toponyme alors extrêmement répandu dans toute l'Afrique du Nord jusqu'aux confins du Sahara. En face de Tigzirt il y a aussi une série d'îlots, tout comme le cas d'Alger, la ville possède en outre des ruines romaines ainsi que les restes d'une importante fontaine, ce qui est en tout point semblable avec le cas d'Alger.

Mais aussi Ténès, Cherchell, Carthage, Tunis, Tanger, Essaouira/Mogador, Barcelone, Marseille, etc., tous les ports protégés sont devancés d'îlots, un fait commun. Tigzirt n'aura pas connu de doute sur son toponyme dans la mesure où aucun enjeu idéologique ne vint disputer la paternité de la ville, contrairement à Alger qui connut un développement croissant, notamment depuis sa réappropriation par Bologhine ibn Ziri, fondateur de la dynastie Zirides (Iziryen en Kabyle et el-ziriyoun en arabe, branche de la nation Sanhadja et allié au Kutama, d'abord alliés, puis vassal des Fatimides, et fondateurs d'El Qahera, alias Le Caire.
A suivre…

(1)Polygraphe : auteur qui écrit sur des domaines variés. (2)Jacques Marie Joseph Louis, comte de Mas Latrie, est un historien et diplomatiste français du XiXe siècle (3) William Mac Guckin de Slane : orientaliste et philosophe du XIXe siècle

Firman L

_Bologhine ibn Ziri est l'arabisation du nom kabyle Vuylughen N'at Ziri

_Dzaîr bini Mezghenna est l'arabisation du nom kabyle Mezghenna At Ziri

_Les falsificateurs arabes tentent de trouver une sortie honorable à leurs mensonges en nous expliquant qu'El Djazaîr est le pluriel d'île en Arabe. Or n'importe quel écolier sait que le pluriel d'île, en langue arabe, c'est Al Djouzour et non pas Al Djazaîr.

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