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Muhand Arav Bessaud: né un soir de Noël mort une nuit de la saint sylvestre.

Muhand Arav Bessaud naissait le 24 décembre 1924 à Tagemmunt llejdid à Iwadiyen en Kabylie et mourait le 1er janvier 2002. Il était militant nationaliste, combattant de la guerre d'Algérie et l'un des principaux idéologues du berbèrisme. Il fut notamment l'un des fondateurs et le principal dirigeant de l'Académie berbère.
Très tôt, dans sa vie, il montre des signes de révolte contre l’autorité française. Aidé par une instruction certaine, il était instituteur à Iwadiyen, l'a poussé à rejoindre le PPA dans un premier temps puis le FLN et l’ALN au déclenchement de la guer
re.

En 1955 il est nommé responsable des liaisons de la wilaya III, par Krim Belkacem. Il sera transféré à la wilaya IVe où il est nommé lieutenant par le colonel Si Nasser. En août 1957, le colonel Bouguerra (si M’hamed) le nomme capitaine. Il quitte alors la wilaya IV à la tête de 200 soldats pour chercher des armes au Maroc. En 1958, il est arrêté au Maroc et emprisonné. Muhand Arav Bessaud est nommé, par décret du 31/12/1962, sous-préfet de Maghnia, un poste qu’il n’occupera jamais.

Il n’acceptera jamais, non plus, le renversement du GPRA par l'armée des frontières et le régime de Ben Bella, ainsi que sa politique d’arabisation, Il se démarque du FLN.
Dans un souci de vérité qui l’a suivie toute sa vie, il écrit en 1963 son fameux livre « Heureux les martyres qui n’ont rien vu », qu'il distribua quasiment gratuitement, où il dénonce, entre autres, les pratiques humiliantes dont il fut victime au cours d'une de ses missions, l’assassinat d'Abane Ramdane, la mort suspecte d’Amirouche et si Lhouas. Un mandat d’arrêt est lancé contre lui, en août 1963.

Il se réfugie à Tagemmunt llejdid. Au déclenchement de la deuxième guerre de Kabylie, 1963, Bessaud rejoint l’armée kabyle, appelée «maquis du FFS», où il joue un rôle important. Après la désaffection des chefs de l’insurrection et étant recherché, il passe clandestinement au Maroc puis il rejoint la France par bateau caché dans une armoire.
En France, il publie, une année après son arrivée, « F.F.S espoir et trahison» où il dénonce le ralliement de Mohand Oulhadj et la trahison d'Hocine Aït Ahmed.
Fervent défenseur de l’identité amazighe, en 1966, au cours d’une réunion au domicile de Taos Amrouche, il crée l’Académie Berbère. Bessaud en sera la force motrice. Les énergies militantes en faveur de la cause identitaire se sont mobilisées et son travail contribuera à l’éclosion des consciences pour la reconnaissance de l’identité et la culture amazighes.
Par son journal «Agraw Imazighen » Bessaud et son équipe universitaire font découvrir à de nombreux lycéens Kabyles, notamment à Alger, où j'étais; dans les années 70 et 80, l'alphabet tifinagh comme signe de l'identité berbère.

Le travail de Bessaud en France a eu un écho favorable en Kabylie, et c’est grâce à cette prise de conscience que nous verrons plusieurs évènements en Algérie qui confirme l’éveil du peuple Kabyle, dans un premier lieu, comme les incidents de la fête des cerises en 1974 aux At Yiraten, en 1977 à Alger, au stade du 5-juillet où Boumediene s’est fait humilier par les supporter de la JSK, mais surtout le printemps Kabyle, dit Berbère, qui s’est déclenché un certain 11 mars, d’Alger vers Tizi Ouzou.

Nous devons à Bessud la mise à jour des prénoms Imazighen, les jours de la semaine, les noms des mois, la numérotation et le calendrier mais surtout la création d’un sigle qui fera le tour du monde et flanquera le drapeau kabyle qu’il a lui-même confectionné. Il a jeté le drapeau kabyle dans la rue et la rue l’a porté. Un drapeau qui prend la symbolique Messaliste à contrepied puisqu'il est de trois bandes horizontales (bleu vert jaune) frappées de l’AZA rouge

Mohand Arab Bessaoud n’a cessé de parler de Jacques Bénet, un Français engagé dans le combat pour l’identité amazighe. Il écrit à son propos dans son livre « L’histoire de l’Académie berbère » : « si les Berbères, mes frères, devaient un jour se souvenir de moi au point de vouloir honorer mon nom, je leur demanderais instamment de lui associer celui de Jacques Benet, car sans l’aide de ce grand ami des Berbères, mon action en faveur de notre identité n’aurait peut-être pas connu le succès qui est le sien. Ce serait donc faire preuve de justice que de dire : Muhand Arav-Jacques Benet comme on dit Erckmann-Chatrian ».

Beaucoup de pressions sont exercées sur Bessoud de la part du régime algérien et marocain pour l'empêcher de continuer dans sa lancée. Il y a eu même des tentatives d’assassinat. Ses ennemis étaient : l’Amicale des Algériens en France (organisation du F.L.N), les communistes et le régime Marocain.

Le 22 mars 1978 Bessaud est arrêté en France pour une accusation fortuite, mais réellement pour ses activités en faveur de l’identité amazighe. L’Académie Berbère sera fermée et tout le matériel et les documents seront saisis. Après six mois de prison il sera libéré provisoirement. Sachant qu’il est en danger de mort et avec l’aide de Jacques Benet il s’enfuit en Espagne. Le 15 août 1980 Bessaud obtient l’asile politique en Angleterre et s’y installe avec le statut de réfugié politique. Une fois en Angleterre, il épouse Dorothy Bannon une Anglaise qu’il a connue en France et aura un fils appelé « Yuva ».

En exil, Bessaoud reste en contact avec le développement du combat en Kabylie. Après maintes tentatives pour se faire délivrer un passeport, refusé dans un premier temps, mais grâce au soutien des journalistes algériens, des étudiants d’Alger et un comité de soutien en sa faveur, il fera son retour retentissant au pays en 1997 et obtient le statut d’ancien combattant. Après des séjours répétés à l’hôpital, le père de l’académie berbère s’éteint à l’hôpital Saint Mary’s de Newport en Angleterre, le premier janvier 2002. Son corps repose désormais au village d'Qawej à Iwadiyen en Kabylie.

À côté des œuvres écrites citées dans la bibliographie, il est l’auteur de plusieurs chants patriotiques tels que : Nesla i Yimazighen, Ay asegwas, agujil, massinissa. Il est aussi l’auteur de quelques chansons interprétées par Takfarinas et Malika Domrane : Teniḍ-iyi γileγ d ssaḥ, Nebwid tafat s-wudem et Makken d-fγeγ seg-wexxam.

Ces chants devraient être inculqués aux enfants kabyles mais aussi aux militants de la cause kabyle. C’est la moindre des choses pour rendre hommage à ce monsieur à qui l’on doit beaucoup. Aussi, pour avoir entre nous ces chants de ralliement qui parfois font défaut aux militants de la Kabylie.

Pour finir mon propos sur Muhand Arav Bessaud je dirais ceci, s’il devait y avoir une bénédiction quelque part, léguée par ce monsieur, qui a échappé à tout pour mourir dans son lit, après que son idée ait gagné toute l’Afrique du nord, nous la trouverions dans le fait qu’il soit né un soir de Noël et mort une nuit de la saint sylvestre.

Il y a des signes qui ne tromperaient pas !

Firman L

Tag(s) : #Alger, #Tizi, #Hydra, #Imazighen, #Ferhat, #Kabyle, #Muhand, #Arav, #Bessaud
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